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Qu'est-ce que le haut potentiel intellectuel ?

Une personne dite à « haut potentiel intellectuel » est quelqu’un présentant un fonctionnement intellectuel – évalué principalement par un test de QI – différent de ses contemporains (en termes de raisonnement, de mémoire, de vitesse de traitement…), qui entraîne très souvent des caractéristiques comportementales propres.
En l’état actuel des connaissances, trois seulement sont scientifiquement avérées :
Un développement précoce chez les jeunes enfants ayant de hautes potentialités (ils tiennent leur tête droite, acquièrent la marche et la parole avant les autres…)
Un langage précoce et structuré (avant deux ans)
Une rapidité d’apprentissage et de compréhension supérieure aux autres individus (ceci tout au long de la vie).

D’autres caractéristiques (hypersensibilité, hypersensorialité, humour caustique, intolérance à l’injustice…) sont souvent présentes, mais pas davantage que dans le reste de la population. Les sujets à haut potentiel intellectuel, notamment les enfants, ayant un meilleur accès au langage, peuvent de fait plus facilement verbaliser leurs ressentis, les rendant plus visibles aux yeux des autres. Néanmoins, la présence de plusieurs de ces spécificités constitue un faisceau d’indices pouvant amener à un questionnement puis potentiellement un test par un psychologue connaissant le sujet.

Les notions de pensées « en arborescence » et l’impression d’un « cerveau qui ne s’arrête jamais », très présentes dans le champ lexical de la littérature sur le haut potentiel intellectuel, n’ont aucun fondement scientifique.

Le Haut Potentiel Intellectuel concerne entre 2% et 3% de la population dans chaque classe d’âge, tous milieux sociaux confondus.

En France, on est considéré comme « haut potentiel intellectuel » lorsque le Quotient Intellectuel Total (QIT) est supérieur ou égal à 130 (au Canada, on prend en compte 125). Cependant, les psychologues ont tendance à donner aujourd’hui davantage un intervalle de confiance (par exemple 123 / 134) qu’un chiffre brut. Un tel test demeure, en effet, très subjectif : pour certains subtests, le résultat dépend du jour, du moment, du stress éventuel du sujet, de son état psychologique, mais aussi de celui du psychologue.

Le test de QI révèle, certes, le degré de culture générale, mais aussi des qualités de mémorisation, d’abstraction et surtout de capacité de raisonnement.
C’est un outil essentiel pour mieux comprendre le fonctionnement cognitif, et s’agissant des personnes dites « HPI » leurs particularités dans ces domaines.

http://les-tribulations-dun-petit-zebre.com/ pour la courbe)

« Surdoué », « intellectuellement précoce », « haut potentiel intellectuel », pour ne citer que les appellations les plus fréquentes, désignent le même profil de personnes. Aucune, d’ailleurs, n’est réellement adaptée.

Un « surdoué » n’est pas « plus doué » que ses congénères, mais plutôt « différemment doué ».
Un enfant « précoce » le sera toute sa vie. Devra-t-on encore lui accoler ce qualificatif lorsqu’il atteindra le troisième âge ?
Quant au « haut potentiel intellectuel (HPI) », il sous-tend des possibilités cognitives que notre époque de performances voudrait voir obligatoirement exploitées… On commence d’ailleurs à utiliser l’expression « avoir de hautes potentialités intellectuelles », qui permet la liberté de s’en servir ou pas, au lieu « d’être H.P.I. », qui n’implique aucun choix possible.

C’est pourquoi nous les emploierons toutes entre guillemets, avec une nette préférence toutefois pour la dernière. Nous éviterons les autres (« zèbres », « sentinelles » et autre « inventaire à la Prévert »)

Acquisition rapide de la parole avec un vocabulaire assez riche, compréhension rapide, excellente mémoire, curiosité et imagination débordante, intensité des émotions, des engagements et difficultés à en hierarchiser l’importance, humour caustique, empathie… Un enfant à « haut potentiel intellectuel » présente souvent plusieurs de ces caractéristiques, mais d’autres sont beaucoup plus paradoxales…

Il peut souvent avoir une certaine avance intellectuelle sur ses pairs, mais peut montrer à l’inverse quelques difficultés motrices. Il peut être  capable de remarques d’une lucidité étonnante, mais peut avoir à l’inverse un comportement totalement immature.

S’il est hypersensible, il peut présenter un détachement émotif apparent ou au contraire l’exprimer de manière ostentatoire. S’il est capable de s’intéresser avec beaucoup d’obsession à une nouvelle passion, il peut s’en désintéresser assez vite et changer de sujet de manière inattendue… S’il a, en général, appris à lire assez tôt et assez facilement, il peut aussi, quelquefois,  avoir davantage de mal lors du passage à l’écrit.

Enfin, on repère davantage les petits garçons que les petites filles : les premiers manifestent plus souvent leur énergie débordante et/ou leur ennui par une agitation visible et souvent gênante, quand les petites filles s’adaptent davantage à ce qu’elles pensent qu’on attend d’elles. 

Ces dernières années, les recherches sur le « haut potentiel intellectuel » ont nettement progressé. Leur prise en compte par certains professionnels, la publication d’un certain nombre d’ouvrages, la diffusion d’émissions de vulgarisation ont permis un partage d’informations et un meilleur accompagnement des personnes concernées, notamment celles en souffrance. Elles ont généré, aussi, leur lot d’opportunistes.

Cette meilleure connaissance demeure malheureusement marginale, autant dans l’Éducation Nationale que dans la santé publique et n’a de surcroît atteint que certaines couches sociales de la population. Il faut en effet du temps pour lire, assimiler, comprendre et trouver des résonances avec sa propre situation ou celle de ses enfants. Il faut aussi admettre que sa propre famille puisse abriter un « surdoué »… Il faut enfin des moyens financiers pour s’informer, adhérer à des associations et s’orienter, le cas échéant, vers des professionnels exerçant, pour la plupart, en libéral.


Pour répondre aux nombreux besoins des familles concernées (informations, détections, accompagnements scolaires et psychologiques…) des praticiens libéraux, palliant les manques du secteur public, ont créé leur activité. Parmi eux se niche aussi un contingent de petits malins attirés par une clientèle en quête de réponses et plus ou moins solvable.
Existe également un profil de personnes en quête de sens et d’un nouveau moyen de gagner leur vie, se formant à de nouvelles techniques de développement personnel pour ouvrir, assez rapidement, des cabinets de ville estampillés « psychothérapie ». Mais on ne s’improvise pas spécialiste : un psychiatre est un médecin ayant fait dix années d’études, un psychologue a appris sa discipline pendant cinq ans.

Méfiance, donc, avec certaines enseignes aux tarifs plus ou moins démocratiques, aux amateurs éclairés, aux spécialistes autoproclamés et autres bonimenteurs médiatiques.

Il y a une vingtaine d’années, le Haut Potentiel Intellectuel – et ses « caractéristiques » – a été défini à partir de cas cliniques constatés en cabinet par des psychologues. Mais en l’absence d’études scientifiques sérieuses, des exemples isolés et biaisés sont rapidement devenus des généralités. Les rares informations disponibles, dont certaines étaient autant d’idées reçues, ont été reprises de sites internet en conversations, de colloques en cabinet de ville, formant un « gloubi-boulga » de connaissances plus ou moins exactes, plus ou moins vérifiées ; notre propre travail n’a pas toujours échappé à cette critique.

Au rang de ces préjugés, la « pensée en arborescence » et le « cerveau qui ne s’arrête jamais » – des poncifs longtemps associés au H.P.I. – n’ont aucun fondement scientifique. L’imagerie par résonance magnétique (I.R.M.) cérébrale montre bien qu’aucun cerveau ne s’arrête jamais (hormis en cas de mort cérébrale) et que tous fonctionnent en arborescence [1]. Seule différence, peut-être, chez les sujets h.p.i. : la vitesse de traitement – souvent plus rapide que chez d’autres – rend ce phénomène plus visible.

[1]Lire Gauvrit (Nicolas), Clobert (Nathalie) (sous la direction de), Psychologie du haut-potentiel, Louvain-La-Neuve, De Boeck Supérieur, Collection « Carrefour des psychothérapies », 2021, pages 137 à 150.